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29 août 2007 3 29 /08 /août /2007 14:00
Liste des spectacles  2007 avec quelques commentaires...

"Maeterlinck" au théâtre de l'odéon:

coordonnées

2, Rue Corneille
75006 Paris
Reservations : 01 44 85 40 40

Dates et heures :
Du 28/11/07 au 01/12/07 à 20:00 : Mercredi, Jeudi, Vendredi, Samedi
Du 03/12/07 au 04/12/07à 20:00 : Lundi, Mardi
Entrée :
28/11/2007 - 01/12/2007 : Plein tarif : 7.50 - 30.00
28/11/2007 - 01/12/2007 : Tarif reduit : 6.00  - 15.00

Comédien : Marc Bodnar, Wine Dierickx, Hadewych Minis, Frieda Pittoors, Sasha Rau, Graham F. Valentine, Steven Van Watermeulen.
Metteur en Scène : Christoph Marthaler.
Auteur : Maurice Maeterlinck.
Chanteur : Rosemary Hardy.
Musicien : Bendix Dethleffsen.

commentaires,critiques  sur la pièce

 

« Qu’est-ce que Maeterlinck ? C’est un Marthaler ». La devinette, qui figure en tête des documents de communication de l’Odéon, est des plus justes ; l’inverse aussi. Après avoir découvert le dramaturge flamand en montant Pelléas et Mélisande, le metteur en scène suisse a décidé de poursuivre son exploration et de consacrer un spectacle entier à ce symboliste belge, prix Nobel et joué sur les scènes du monde entier. C’est une connaissance intime de l’œuvre et du contexte d’origine de Maeterlinck que ce spectacle éponyme reflète. Tressage des textes plus qu’habile, jeu sur les langues (français, néerlandais, allemand : les trois langues nationales belges et celles de la distribution, plus l’anglais), scénographie saisissante de réalisme revisité : tout concourt à mettre en valeur le propos. Des ouvrières ou des patrons, qui a le destin le plus tragique ? Englués dans une attente pesante, sans issue apparente autre que le rêve, ni les uns ni les autres ne s’en sortiront. Le recours systématique à la musique et une lumière feutrée en douche donnent à la mise en scène la couleur des brouillards où Maeterlinck plonge la plupart de ses intrigues. Un symbolisme contemporain, teinté de la tendresse inaliénable de Marthaler pour les petites gens. Maeterlinck ? C’est bien un Marthaler ! Illus © Phile Deprez

l'inkoruptible
Décidément, les accointances de Christoph Marthaler avec la Belgique s’affirment de plus en plus et l’on pourrait oser un parallèle entre l’affirmation du metteur en scène - « Je suis Suisse, on n’y peut rien changer » - et son goût pour le récital chanté appliqué souvent, dans les années 80 et 90, à l’expression d’une « helvétitude » qui, pour être cocasse, n’en est pas moins critique. Sauf qu’aujourd’hui, la « belgitude » est une notion malmenée et qui menace de se briser. Aussi drôle, frisant le ridicule et caracolant sur le grotesque, que soit le Maeterlinck qu’il propose aujourd’hui, Christoph Marthaler brosse surtout le tableau d’une communauté d’hommes et de femmes sommés, ensemble, (et même un peu sonnés) de tailler le portrait de toute une société.

Embarqués dans un atelier de confection où des ouvrières endormies commandent à des machines à coudre revêches tandis que des contremaîtres les bousculent, tout gonflés de leur importance, nous assistons au point de croix brodé dans l’œuvre de l’écrivain gantois : de Pelléas et Mélisande au Trésor des humbles ou à L’intelligence des fleurs, une dizaine de textes de Maeterlinck s’échappent, par fragments, de bouches rêveuses ou autoritaires, et de corps assoupis ou gesticulant qui menacent souvent d’être ensevelis sous une pluie de tissus. Parfois aussi, les machines marchent toutes seules, mécaniques autonomes qui donnent aux rêves leur cadence et leur tempo. C’est un peu l’ombilic des songes que donne à voir et à entendre ce Maeterlinck enchanté par les musiques de Debussy, Satie, Bizet, Mozart et quelques autres, mêlant le sublime aux facéties de chants folkloriques roucoulés, murmurés, criaillés, jappés et mêmes ronflés… On croit rêver, on se voit revenus en enfance, jouant des sons jusqu’à les voir caracoler entre deux notes et taquiner la mélodie. Et d’ailleurs on y est, il suffit juste de tendre l’oreille pour entendre le poète nous confier : « Un grand nombre de nos pensées attaquent notre âme par derrière. » Une de ces intuitions pré-freudiennes qui font le miel de ce Maeterlinck visité par Marthaler.
A gauche de la scène, un contremaître pianiste joue avec application des airs bien connus de Carmen, dont la Habanera, la Séguédille.... Un autre lubrique, emmène l'une des employées dans un placard en actionnant avec son pied une pompe imaginaire. A chacun d'imaginer.

La supérieure fait résonner sa voix d'or de dos tandis qu'elle joue sur son épinette.

Vient un moment où les supérieurs se retirent. C'est alors que les jeunes couturières se lèvent, entonnant des phrase sur leur métier, des chants hollandais sortis de contes pour enfants.

La spectatrice que je suis pensent à un tableau de l'école hollandaise tout comme à une oeuvre de Maeterlinck, Intérieurs, vu voici quelques années au théâtre les Gémeaux de Sceaux, retrouvant la même ambiance figée et chargée de tensions et d'émotions.

Gommer par la gestuelle, les silences, le bruit, la révolte, les contradictions internes, la soumission, est une prouesse de l'auteur comme du réalisateur suisse.

Les supérieurs reviennent, entonnant à leur tour des chants, tantôt élisabétains, tantôt flamands, aux accents parfois scatologiques.

Les voix sont sublimes comme si cet instrument naturel poétisait une situation d'esclavage, de prison, de soumission.

Le final est un retour à la case départ : le crescendo poco a poco, fortissimo de la couturière naine vêtue de rouge qui retombe dans son état de catatonie.

C'est l'éternel retour.


liberation

«Tâchons d’être plus beaux que nous-mêmes», lance Wine, voix ahurie, l’air d’une poupée engoncée dans un caraco sous blouse informe. Joues pâles, gros collants de laine, cheveux longs,

Wine est une des quatre ouvrières postées autour des machines à coudre d’un atelier verdâtre, aux côtés surélevés d’un trottoir, promenoir des patrons et de Frieda, la chanteuse en chef, où perchent un piano et un harmonium.

Les machines ont encore une pédale, les couseuses vont s’endormir sur place, le pianiste aussi. C’est un exemple des pannes voulues, «suspens» jalonnant le chemin buissonnier de Marthaler à travers l’œuvre de Maeterlinck. Chutes soudaines dans le rien mécanique. Tandis que les patrons, à l’arrière-plan, palpent et brassent des coupons, la chanteuse-matronne se souvient des couplets de Purcell sur la douceur des aubes, le pianiste tricote le refrain de Carmen, les filles entonnent Mozart, autre opium du peuple.

Avec ce spectacle Maeterlinck , où le fantôme fugace du Golaud de Pelleas et Melisande se fait taulier en costume-cravate désireux de toucher les bras des femelles qu’il exploite, on pourrait dire que Christoph Marthaler chemine en pur marxiste. Mais comme toujours, avec ce poète-musicien du plateau, les choses, les êtres, les mots, les chants a cappella , les ponctuations des modestes claviers, emmènent vers des ailleurs, des souterrains, des indicibles, des précipices… Des courts-circuits où les inconscients oscillent entre le désarroi et le comique le plus élémentaire : répétitions, blagues, grimaces sorties de chez Bosch ou Ensor.

Marthaler a tout lu de la Vie des abeilles , cette bible où l’auteur flamand, né en 1862, parlait des sociétés d’un XXIe siècle dont les vraies abeilles elles-mêmes sont en train de mourir. Maeterlinck, le dramaturge aimé des compositeurs, écrivit aussi sur les termites et les fourmis, insectes sociaux, et publia des essais et poèmes aux titres limpides : le Trésor des humbles ou Visions typhoïdes .

Astres. Il savait peindre de sulfureuses éruptions d’ossements sur les villes, des ébullitions de cartilages sur les eaux, des dégorgements de végétaux, des jets verts de races antédiluviennes, de lymphatiques confluences d’astres, des marécages d’yeux multipliant la lune.

Il y a une spectaculaire césure au fil du voyage mental développé par les huit interprètes de Marthaler. Soudain s’éteignent presque les longues ampoules-cylindres éclairant à cru et blafardement la rangée de machines à coudre. Et aussi soudainement, dans une pénombre lunaire de réunion de famille, une autre angoisse s’installe. Disparue, l’usine. Se déploie un songe, avec une mystérieuse sœur perdue : intervalle en forme d’«insert» agissant. Ou un flash-back ? La lumière reviendra. Une chanson encore.

Vides. Le charme perdure d’un instant l’autre, et dans les trous entre les instants, ces vides de la vie, de la mélancolie. Se déplaçant au temps où les pauvres chantaient entre eux des morceaux de la messe en latin (Kirie Eleison égale «Seigneur prends pitié»), Christoph Marthaler fait sienne cette observation de Maurice Maeterlinck : «Un grand nombre de nos pensées attaquent nos âmes par-derrière.»

Les noces de Marthaler et Maeterlinck


Sous son allure d’ours tranquille , Christoph Marthaler est décidemment un des plus grands artistes du moment. Chacun de ses spectacles est bouleversant. Ce metteur en scène et créateur s’immerge dans une œuvre – hier « la Traviata » de Verdi aujourd’hui « Maeterlinck »- pour en faire son miel, inimitable. Oui, on reconnaît sa patte au premier coup d’œil, tout comme dès la première image on savait qu’on était chez Tadeusz Kantor. Chez Marthaler, toujours, on se retrouve face à un espace vaste, public, un peu décati, fatigué, éclairé de néons trop blancs. ( et signé Anna Viebrock). Cette fois, s'attachant à l’œuvre de Maurice Maeterlinck, il s’est arrêté à cette phrase peut-être, de « La vie des Abeilles » : « Dans la ruche, l’individu n’est rien, il n’est qu’un moment indifférent, un organe ailé de l’espèce ». Va pour la ruche, soit un atelier de confection type après-guerre ou s’affairent de besogneuses ouvrières sous l’œil de contremaîtres rigides. Des armoires métalliques, un fatras de tissus, de gravats au sol , de fils électriques, et un piano, bien sûr , complètent ce tableau aussi étrangement familier qu’une photographie d’époque, mais revisitée par un Chirico, avec ça et là une porte trop grande, ouvrant sur un espace secret, vide.
Dans la ruche de Marthaler, l’individu n’est jamais « rien », au contraire, il est perclus de nostalgie, de tristesse, son corps trahi son âme...Seule la musique, le chant, parvient soudain à teinter ses yeux d’or, et à le fondre, furtivement, dans une humanité chorale, aspirant à une vie plus belle, et vaste. Les ouvrières, petites robes tabliers, longs cheveux à la Mélisande, s’endorment, sommeillent, ou disent : « Comme tout le monde, je m’appelle Georgette ». Les contremaîtres , une femme, trois hommes, font leur boulot : surveiller, punir d’un regard, abuser peut-être. Eux aussi parfois sont saisis de léthargie, d’une fatigue immense, leurs gestes sont pris dans un carcan aussi contraignant que leur costume. Tous les acteurs sont aussi chanteurs, et d'une densité de présence impressionnante, dont le pianiste Bendix Dethleffsen, coincé face à un mur, avec, posé sur son piano droit, un rétroviseur de camion...
Il ne se passe aucune action dans « Maeterlinck », sinon de menus accidents de la vie, comiques ou non: l’explosion d’une machine à coudre aussi épuisée que son utilisatrice, de longs cheveux qui se coincent sous l’aiguille, une panne d’électricité. Le temps semble être figé, mais il est agité, par soubresauts, de rapports de classe, des mouvements de conscience, et l’acte de chanter. La musique coule du fonds des âmes, tandis que le bruit des machines à coudre bourdonne, lente ou frénétique. De Purcell à Debussy, en passant par Mozart ou de triviales chansons populaires flamandes (Maeterlinck est né à Gand), Marthaler a pioché dans toutes les époques, et ce qui chez un autre ferait pot-pourri est chez lui « cut-up », et harmonie secrète, tant il a l’oreille musicale, tant surtout il comprend ce que recèle la musique.
Et quand s’élève « La Messe des pauvres » d’Erik Satie, de tous ces corps à coté de leurs pompes, comme on dit, ouvrières et contremaîtres confondus, remontent à la surface toutes ces phrases entendues, glanées, ou non, par Marthaler, dans l’œuvre de Maeterlinck. Celle-ci, par exemple : « Il n’est pas dit que tous les êtres que nous rencontrons soient nécessairement des vivants ». Oui, mais il n’y a pas plus vivant que le flux et reflux de cet ruche drôle, désespérée, qui pour un peu, ferait pleurer ( à l’Odéon, jusqu’au 4 décembre, et puis à Berlin, Munich, la Haye..).



Ariane et Barbe-Bleue à l'opéra Bastille

coordonnées

120, Rue de Lyon
75012 Paris  Plan d'accès
Tel : 01 43 43 96 96
Fax : 01 40 01 16 16
Reservations : 08 36 69 78 68

Dates et heures :
Du 02/10/07 au 06/10/07à  19:30 : Mardi, Samedi

Entrée :
13/09/2007 - 06/10/2007 : Plein tarif : 5.00 - 130.00

commentaires,critiques sur la pièce

le figaro:

Le chef-d'oeuvre méconnu de Dukas est longtemps resté dans l'ombre du «Pelléas et Mélisande», de Debussy.

 
POURQUOI monter aujourd'hui Ariane et Barbe-Bleue, de Paul Dukas, à l'Opéra Bastille ? Pas seulement pour faire acte de sauvegarde du patrimoine, mais pour redonner sa place à un chef-d'oeuvre méconnu du répertoire français, qui n'a plus été monté à l'Opéra de Paris depuis 1976.
 
Ariane et Barbe-Bleue a joué de malchance. Créé en 1907 à l'Opéra-Comique, il ne pouvait que subir l'ombre du Pelléas et Mélisande de Debussy, donné cinq ans avant au même endroit, sur un livret du même Maurice Maeterlinck, et aussitôt porté au triomphe. Dukas, compositeur extrêmement exigeant, laisse finalement fort peu d'oeuvres. Outre son poème symphonique, L'Apprenti sorcier, immortalisé par Fantasia de Walt Disney, on lui doit un ballet, une Symphonie en ut et une immense Sonate pour piano.
 
Ariane et Barbe-Bleue est typique de cette époque où la musique française assimile aussi bien les harmonies debussystes, l'orchestration wagnérienne, le sens de la forme dynamique hérité de Beethoven. C'est peut-être pour cela qu'Ariane fut appréciée aussi bien par le conservateur Vincent d'Indy que par l'avant-gardiste Schoenberg. Les échos de Pelléas y sont indéniables (jusqu'à une citation littérale lorsque l'épouse de Barbe-Bleue, prénommée Mélisande, entre en scène). Mais le langage de Dukas reste personnel jusqu'au bout. « Composite dans sa source mais très personnel dans sa réalisation », dira de lui son élève Olivier Messiaen.
 
Outre sa musique si puissamment évocatrice, c'est aussi le sujet d'Ariane qui est captivant : cette vision très particulière du conte de Perrault, où la libératrice Ariane doit finalement accepter l'idée que les femmes de Barbe-Bleue préfèrent leur servitude rassurante à l'effrayante liberté ! « Personne ne veut être délivré », commentait Paul Dukas, qui ajoutait : « Et puis la vérité est qu'on ne peut délivrer personne : il vaut mieux se délivrer soi-même. »

webthea.com

Du poétique au social, une tentation qui tourne en rond
Opéra National de Paris - Bastille

Pour qu’une œuvre du passé prenne du sens au présent, faut-il à tout prix lui faire subir des liftings de chirurgie politico-sociale ? Pour qu’une mise en scène nouvelle s’impose et convainque, doit-elle, à n’importe quel prix, miser sur l’épate ? Parfois au détriment du sens ? Souvent au détriment de la musique ?

La question se pose de plus en plus souvent et la production attendue de l’unique opéra de Paul Dukas, cette Ariane et Barbe Bleue composée sur les ailes symbolistes du poète Maurice Maeterlinck remet le débat sur le tapis. Ou plutôt sur le gril d’une mode qui commence à s’essouffler : la tentation de ramener le poétique au social. Certes cette Ariane qui déclare d’entrée de jeu « Il faut désobéir, c’est le premier devoir quand l’ordre est menaçant » dégage des effluves révolutionnaires, voire féministes avant la lettre – l’œuvre fut créée en 1907 à l’Opéra Comique – mais sa démarche dans les dédales du labyrinthe où Barbe Bleue a enfermé ses trésors et ses femmes relèvent avant tout d’une démarche initiatique. La quête de la liberté, de la libre disposition de sa vie, de son corps… Certes cette quête est loin d’être achevée, d’hier à aujourd’hui, elle reste ouverte… Est ce une raison pour la transposer dans le misérabilisme d’une sorte de PME en déconfiture où les portes s’ouvrent sur des bureaux avachis éclairés au néon, où la grotte sacrée où sont retenues les épouses-otages devient au choix l’arrière salle d’une sorte de bureau de poste ou les toilettes d’une école de banlieue à l’abandon ? On sent les effets d’une esthétique importée l’ex-RDA en réaction et règlement de compte avec le système qui s’effondra en même temps que le mur de Berlin.

Une suite de tableaux lugubres soulignés par des images vidéo

Anna Viebrock qui signe la mise en scène de cette transposition radicale est la décoratrice familière du Suisse Christoph Marthaler, l’un des grands hommes de théâtre de notre temps, l’auteur, entre autres, de quelques formidables et salubres dépoussiérages vus à l’Opéra de Paris depuis que Gérard Mortier en tient les rênes– Katia Kabanova – Les Noces de Figaro – La Traviata (voir webthea des 22 juin 2007, 27 mars 2006et 3 novembre 2004 …) -. Elle exécute sans doute efficacement ses visions, ses options mais n’a ni son souffle ni son talent de directeur d’acteurs. Le résultat se résume en une suite de tableaux lugubres, soulignés côté cour, et en direct, par des images vidéos en noir et blanc qui font ressembler les détails filmés à la soute d’un navire de fret.

C’est triste et laid, en contradiction permanente avec la luxuriance des harmonies musicales de Dukas, du pur jus français où les legs de Debussy croisent encore ceux de Wagner ou de Beethoven. Le coup de chapeau à Debussy est d’ailleurs émouvant quand, à l’énoncé des prénoms des captives, celui de Mélisande entraîne une citation « in texto ». Quant aux dialogues dont on happe le sens et la flamme grâce aux surtitres – la diction des interprètes étant approximative -, il apparaît comme né d’un autre monde, comme une parure de dentelles jetée sur un sac de jute… Hors propos. Il faut attendre le troisième acte quand tout s’éclaire et que les femmes de l’ogre Barbe Bleue enjambent la balustrade de béton pour faire un pas vers une liberté qu’elles finiront par réfuter pour que les partis pris de Anna Viebrock trouvent enfin une justification, une cohérence et un grain de fantaisie.

Précis, tendu, sur le qui vive Sylvain Cambreling sauve la soirée

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Hélène Guilmette (Mélisande) Diana Axentii (Sélysette) Iwona Sobotka (Ygraine) Jaël Azzaretti (Bellangère)

Si Deborah Polaski, belle tragédienne souvent applaudie dans ce même théâtre peut camper une Elektra plausible, son vibrato persistant, son legato instable et ses aigus en montagne russe s’avèrent bien insuffisants face aux exigences de l’un des rôles les plus difficiles du répertoire lyrique. Son accoutrement en inspectrice d’une PJ des années quarante, ou d’une émule de Maigret, feutre, imper et appareil photo en bandoulière, n’aide guère à la crédibilité d’une Ariane amoureuse et rebelle. En nourrice au allures de préceptrice Julia Juon heureusement lui donne une réplique d’une belle intensité. Les cinq épouses apportent fraîcheur et justesse, Willard White en Barbe Bleue a si peu de chose à faire et à chanter qu’il passerait presque pour un figurant. Reste sa présence toujours magnétique.

C’est Sylvain Cambreling qui sauve la soirée, à la fois précis, tendu, violent et sur le qui vive. Quand Paul Dukas rejoint Maurice Maeterlinck dans ses ornementations symbolistes il prend ses distances. Son Dukas est de braise. Il nous enflamme. Enfin !


télérama:

Paul Dukas est le compositeur d'un unique opéra - Ariane et Barbe-Bleue, créé à Paris en 1907. Comme pour le Pelléas de Debussy, c'est à une pièce de Maurice Maeterlinck que l'auteur de L'Apprenti sorcier emprunte son livret. Et comme pour Le Château de Barbe-Bleue, de Béla Bartók, c'est l'histoire du héros sanguinaire de Charles Perrault qui l'inspire. Quant à Ariane, c'est en familière des labyrinthes qu'elle s'aventure dans le château, sûre d'y découvrir encore vivantes les cinq épouses précédentes du Minotaure moderne, et sûre de les libérer. L'opéra s'achève pourtant sur une déconvenue : Ariane repart seule avec sa nourrice, sans être suivie par celles qu'elle a inutilement délivrées. Ce pessimisme altier témoigne aussi de la personnalité énigmatique de Dukas, à laquelle s'applique l'observation de Maeterlinck : « Il y a une mer intérieure dans notre âme, une mare tenebrarum effrayante. »

A tous ceux que la production récente de l'Opéra Bastille, lugubrement prosaïque, a déçus et frustrés, cet enregistrement magnifique apporte la preuve que l'opéra de Dukas est un authentique chef-d'oeuvre dramatique, aux sonorités d'une étrangeté et d'une luxuriance envoûtantes. Encore fallait-il un chef - l'Américain Leon Botstein - respectueux de la respiration large et profonde de l'orchestre. Et une héroïne principale au timbre solaire (la soprano Lori Phillips) pour por­ter la lumière dans les ténèbres de l'emprisonnement.

Gilles Macassar

blog parisbroadway:

Opéra Bastille, Paris • 24.9.07 à 19h30
Paul Dukas (1907). Livret de Maurice Maeterlinck.

Mise en scène : Anna Viebrock. Direction musicale : Sylvain Cambreling. Avec Deborah Polaski (Ariane),
Julia Juon (la Nourrice), Willard White (Barbe-Bleue)…

J’ai suspendu temporairement mon boycott de Sylvain Cambreling afin d’entendre cette œuvre particulièrement peu représentée et que l’Opéra de Paris a la bonne idée de nous refaire découvrir pour le centenaire de sa création. C’est une partition au riche langage harmonique, qui semble regarder tantôt du côté de Debussy, tantôt du côté de Wagner.

La production de l’Opéra de Paris est désespérante tant elle semble caricaturer tout ce qu’est devenue la maison ces derniers temps. On n’a même plus la force d’être agacé par ce décor laid et déprimant, remake en pire de celui du Kát’a Kabanová de Marthaler. Le pauvre Dukas n’a donc le droit d’être représenté dans sa patrie qu’à condition de passer sous les fourches caudines du Regietheater dans ce qu’il a de plus réducteur, de plus caricatural et de plus stérile.

Et, pour remonter le niveau, on nous met dans la fosse un chef cérébral et hyper-analytique, incapable de trouver le moindre moment de plaisir débridé dans une partition qui foisonne pourtant de petits bonheurs. Pour s’en convaincre, malheureusement, on ira écouter le bel enregistrement de l’œuvre par le BBC Symphony Orchestra paru chez Telarc il y a deux mois environs.

La distribution, heureusement, remonte un peu le niveau d’ensemble. Deborah Polaski n’est pas toujours totalement à l’aise, mais elle fait de jolis efforts… et elle est en bonne compagnie sur scène, notamment grâce à la Nourrice très convaincante de Julia Juon.

mon commentaire perso:

J'approuve bon nombre des remarques précédentes. Cette production lugubre,froide et  pseudo sociale  détruit toute la poésie,la puissance et le mystère de l'oeuvre. L'utilisation de  projections vidéo floues et verdâtres n'apporte rien de plus à la mise en scène  et correspond plutôt à un effet de mode ( les multimédias envahissent toutes les domaines artistiques...).

l'oiseau bleu au jardin d'acclimatation
du 2 decembre au 4 janvier

les aveugles à Thionville
du 23 au 31 janvier

la mort de Tintagile
paris 19e du 27 decembre au 6 janvier
Le musée imaginaire de Maurice Maeterlinck.
Image et écriture dans le symbolisme

A. Carte - W. Degouve de Nuncques - M. Denis - A. Donnay – C. Doudelet – F. Khnopff - G. Minne - O. Redon - F. Rops – L. Spilliaert…

 

Exposition présentée au Musée provincial Félicien Rops

Du 19 janvier au 13 avril 2008

 

« Le poète ajoute à la vie ordinaire un je ne sais quoi qui est le secret des poètes, et tout à coup elle apparaît dans sa prodigieuse grandeur ».  Maurice Maeterlinck, Le Trésor des humbles, 1896.

 

Maurice Maeterlinck (1862-1949), poète, auteur dramatique et essayiste, nourri de philosophie, a profondément marqué l’histoire littéraire et culturelle belge et internationale, non seulement par son génie, mais aussi par les idées philosophiques qu’il véhicula à travers un style d’avant-garde : le symbolisme. Seul écrivain belge à avoir reçu le Prix Nobel de littérature (1911), Maeterlinck fut entouré des plus grands poètes et artistes de son temps : Mallarmé, Verhaeren, Redon, Burne-Jones, Khnopff, Debussy, etc. Il est aussi bien connu pour sa poésie (Serres chaudes, 1889) que pour son théâtre (Pelléas et Mélisande, 1892).

 

Créer, le temps d’une exposition temporaire, le musée imaginaire de Maurice Maeterlinck en regroupant les œuvres qui l’ont inspiré et les artistes qui ont illustré ses ouvrages, telle est l’initiative originale que vous pourrez découvrir… Une série d’artistes belges et français, Léon Spilliaert, Fernand Khnopff, Auguste Donnay, Charles Doudelet, William Degouve de Nuncques, George Minne, Odilon Redon ont approché les œuvres littéraires de l’auteur par le biais de la peinture, du dessin, de l’illustration.

 

Le parcours de l'exposition suit une progression qui va de la poésie au théâtre. Il permet au public de découvrir des œuvres de techniques différentes, mais aussi des livres illustrés, sculptures, reliures, photographies et documents d'archives mettant en scène les poèmes et textes de Maurice Maeterlinck.

 

Les amateurs d’art, de littérature, de symbolisme auront l’occasion de se plonger dans l’univers du grand poète belge, dans une ambiance bleutée et feutrée… Pousser une porte, ouvrir un livre, rêver à d’autres mondes…

 

« Mes paupières sont fermées, mais je sens que mes yeux sont en vie ». Maurice Maeterlinck, Les Aveugles, 1891.

 

 

Exposition :le musée imaginaire de Maurice Maeterlinck

 

A. Carte - C. Schwabe - G. de Feure - W. Degouve de Nuncques - J. Delescluze - M. Denis - A. Donnay – C. Doudelet – M. Garden - F. Khnopff- J.M King - M. Kufferath - G. Le Roy - F. Masereel - G. Minne - P. Ranson - O. Redon - F. Rops – C. Samblanx - L. Spilliaert - E. Steichen - Vuillard/Sérusier

 

 

 

 

En collaboration avec l’Université libre de Bruxelles

 

Commissariat d’exposition : Denis Laoureux, professeur au Département d'Histoire de l'art de l'Université libre de Bruxelles

Exposition accessible tous les jours de 10h à 18h, sauf le lundi.

Prix d'entrée: 3 €/Prix réduit : 1,5 €
Billet combiné (collection permanente et exposition temporaire) : 5 € / Prix réduit : 2,5 €

Audioguide : 2 €

Catalogue : Denis Laoureux, Maurice Maeterlinck et la dramaturgie de l'image. Les arts et les lettres dans le symbolisme en Belgique, Anvers, Pandora (Cahiers), sortie de presse pour l'exposition. Prix : 30 €

 

 

Programmation autour de Maurice Maeterlinck

 

30/01/2008 à 12h30

Projection du documentaire : Hors texte : Maurice Maeterlinck de Jean Antoine avec G.Duhamel, M. Martin Du Gard, J.Rostand, J.Romain, J.G. Domergues, 1962, 33 min.

Entrée libre. En collaboration avec la RTBF.

 

15/02/2008 à 20h00

Images intérieures et correspondances musicales : autour de Maeterlinck

Un concert de Thérèse Malengreau, pianiste

Les rapports entre l’œuvre de Maeterlinck et la musique sont évidents.

Que ce soit à partir de compositeurs qui ont créé des partitions en s’inspirant des textes de

Maeterlinck (Debussy, Fauré, Sibelius, Louis Durey) ou des pages musicales qui témoignent de la

cohésion artistique de l’esprit symboliste et des mouvements fin-de-siècle (Wagner, Liszt,

Chausson, Scriabine, Fabre, Dupont, Decaux ou Griffes), les images intérieures de l’idéal, du

silence, de la nuit, des eaux dormantes, de la mort sont évoquées à travers ce concert original

créé par Thérèse Malengreau.

Entrée : 10 €. Maison de la Culture de la Province de Namur, 14, av. Golenvaux, 5000

Namur. Réservation souhaitée : 081/ 22 90 14. Grâce à Dexia Banque.

 

29/02/2008 à 20h30

Auguste Donnay :  une illustration de l'imaginaire du Théâtre de Maeterlinck.

Conférence d’Adrienne Fontainas, Vice-Présidente de l'Association internationale de bibliophilie et co-auteur d’un ouvrage sur Edmond Deman.

Entrée : 2,5 € (visite de l’exposition comprise)

 

07/03/2008 à 12h00

Concert de midi donné par les étudiants de l’IMEP, en collaboration avec Sophie Hallynck : musique symboliste, piano, violon donneront une nouvelle vision du travail de Maeterlinck au public.

Entrée : 5 € (collation et visite de l’expositions comprises).

 

19/03/2008 à 12h30

Projection du film d’art : Les Silences Spilliaert de Wilbur Leguebe, 2002, 52 min.

Entrée libre. En collaboration avec le Centre du Film sur l’art.


Pélléas et Mélisande,un spectacle de la compagnie Hi han
Draguignan

Billetterie : 04 94 50 59 59 billetterie@theatresendracenie.com
février 2008

Tarif : De 6 à 14 euros
théâtre en Dracénie
Boulevard Georges Clemenceau
DRAGUIGNAN (83300)





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 Ce blog est dédié à l'oeuvre et à la vie de Maeterlinck, poète symboliste belge de la fin du XIXème siècle/ début XXème siècle. Vos commentaires aux articles et aux pages sont les bienvenus!

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